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;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;; ;; Magazine municipale Nantes Passion, n.230, janvier 2013 ;; Il y a 70 ans, le procès des « 42 » ;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;; En janvier 1943, ce sont en fait 45 résistants communistes qui sont jugés à Nantes par un tribunal militaire allemand. 37 seront condamnés à mort. Le 15 janvier 1943 s'ouvre le procès dit des « 42 ». Ce sont en fait 45 résistants communistes, dont deux femmes, qui sont traduits devant le tribunal militaire allemand. Arrêtés par l'appareil répressif de Vichy et livrés à l'occupant en août 1942, ils sont jugés pour des actes de résistance qui vont du sabotage à l'exécution du responsable du personnel de l'usine des Batignolles, un collaborationniste. Peu de villes en France connaissent une guérilla urbaine menée contre l'occupant. Nantes, ville martyre depuis l'exécution des 50 otages en octobre 1941, en fait partie. Parmi ces combattants de l'ombre qui se dressent contre l'ennemi, il y a des réseaux communistes des Francs-Tireurs et Partisans, les FTP. Ils accueillent dans leur rangs les républicains espagnols qui ont fui le franquisme et la guerre civile. Cinq d'entre eux sont jugés également, aux côtés de 40 Nantais et Rezéens. Le procès des « 42 » est mis en scène par les nazis comme un grand spectacle de propagande. La salle du tribunal est parée d'oriflammes marquées de croix gammées. Il est ouvert au public et les journalistes sont invités à le couvrir. Le Phare, dans son édition des samedi 16 et dimanche 17 janvier 1943, titre : « Le procès de 42 terroristes arrêtés dans la région nantaise a commencé hier matin au palais de justice. » C'est le troisième procès du genre en France contre les résistants communistes après ceux, en 1942, de la Maison de la chimie et du Palais-Bourbon, à Paris. Son objectif est de terroriser la population, car la Résistance intensifie son action dans le département. Quarante neuf chefs d'accusation sont retenus contre les inculpés comparaissant devant le tribunal militaire allemand. Le process dure à peine deux semaines. La sentence tombe le 28 janvier 1943 : la peine capitale est prononcée à l'encontre de 37 condamnés. Le président leur demande alors s'ils ont quelque chose à déclarer. « Au tribunal allemand, je n'ai aucune déclaration à faire », dit à ses bourreaux le métallo nantais Louis Le Paih. « C'est un honneur pour un Français que de mourir sous les balles allemandes », déclare Auguste Chauvin, également ouvrier des Batignolles. Les condamnés chantent La Marseillaise et l'Internationale sous les coups des gendarmes allemands. Le Phare titre après le verdict : « La civilisation occidentale épure... » Dès le lendemain du procès, un premier groupe de neuf résistants est passé par les armes au champ de tir du Bêle. Vingt-cinq condamnés seront fusillés le 13 février puis trois le 7 mai 1943. À ce décompte macabre viendront s'ajouter les fusillades de 13 autres militants communistes le 20 août, portant à 50 le nombre de résistants communistes exécutés en 1943. Après la tragédie des 50 otages, Nantes paie à nouveau le prix fort à l'Occupation. Pourtant, le procès va tomber petit à petit dans l'oubli lorsque la paix revient. À la Libération, malgré leur sacrifice, la mémoire des « 42 » est supplantée par celle des 50 otages. Rapidement, c'est à leur martyr que l-on rend hommage. Dès octobre 1944, la municipalité baptise l'artère centrale aménagée sur l'ancien lit de l'Erdre cours des « 50 Otages ». « La charge émotionnelle, les enjeux de mémoire n'étaient pas du tout les mêmes. L'exécution des 50 otages avait eu un retentissement international. De Gaulle avait réagi immédiatement sur les ondes de la BBC et l'auteur allemand Thomas Mann y avait prononcé une allocution sur cet épisode tragique. », souligne Marc Grandgiens, historien et documentaliste, auteur en 2003 d'un film documentaire sur le procès des « 42 ». Les otages fusillés en octobre 1941 étaient représentatifs de la société française de part leurs professions, leurs opinions politiques, leur âge, du jeune communiste de 17 ans - Guy Môquet - à l'ancien mutilé de guerre nantais, Léon Jost. Il n'en est rien pour les « 42 », tous résistants communistes FTP. Avec la guerre froide et l'affrontement local entre gaullistes et communistes, un conflit mémoriel se cristallise. « De 1947 à 1977, les municipalités Orrion puis Morice occulteront cet épisode noir de la Seconde Guerre mondiale. Rien à Nantes ne viendra le rappeler. À Rezé en revanche, les 13 fusillés originaires de la commune seront commémorés sans interruption. Une plaque à l'entrée du cimetière Saint-Paul porte leurs noms », poursuit Marc Grandgiens. Puis le parti communiste préfère mettre en avant également les 27 martyrs de Châteaubriant, exécutés parmi les 50 otages d'octobre 1941. Il construit ainsi partiellement sa mémoire de « partie des fusillés », morts pour leurs idées et non pas en combattant et en commettant des attentats, comme c'est le cas des « 42 ». Il faudra attendre soixante ans pour réhabiliter la mémoire des « 42 ». Pour la première fois, en janvier 2003, un hommage officiel est rendu aux 37 résistants communistes fusillés en 1943. Le collectif Procès des 42, qui réunit notamment le comité départemental du Souvenir et la Fédération départementale des déportés, voit ainsi son action aboutir.